“Tiens, c’est comme chez nous” : les séries TV qui résonnent
Une sélection de séries TV qui font du bien, posent question ou ressemblent un peu à ce qu’on vit (en vrai).
Une des grandes difficultés quand on a un enfant atypique, c’est… la norme.
L’obligation silencieuse de "faire comme les autres".
Progressivement, en tant que parent, on réalise :
qu’on joue à un jeu où les règles ne sont pas adaptées à notre enfant, et où gagner est donc impossible,
que suivre cette norme demande beaucoup trop d’énergie, pour un résultat souvent décevant,
que se comparer ne sert qu’à nous déprimer.
Alors on se met en quête.
D’autres modèles. D’autres repères. Pour adapter, bricoler, réinventer cette fameuse norme.
Où les trouver, ces modèles ?
Les groupes en ligne peuvent être précieux, riches en astuces, en soutien.
Mais parfois, ce qu’on aimerait, c’est juste voir comment font les autres, en vrai.
Même si des rencontres existent entre familles, ce sont souvent des moments rares.
Toi, le "comment faire", il est là H24. Et l’isolement aussi, parfois.
Ajoute à ça la fatigue. Le besoin de répit. Et on en arrive à une solution… qui, je pense, te parlera sûrement :
Les séries TV.
Comme source de répit, de réconfort… et parfois, de redéfinition de la norme.
Plus jeune, j’écoutais la radio en faisant la cuisine ou le ménage.
Seule, je lisais en mangeant.
Ça remplaçait l’absence de compagnie, ou ça m’entourait de voix et de personnages différents de mon quotidien.
Aujourd’hui, je regarde des séries.
Parfois en mode "pause totale", parfois en mode "compagnie pendant que je fais les repas pour tout le monde" (vive les allergies et la sélectivité), ou pendant un petit moment de pause.
Les séries, c’est parfait pour nos vies en mode patchwork :
C’est court.
C’est plus accessible qu’un roman.
Et comme on retrouve les mêmes personnages à chaque épisode, ça crée une routine douce et familière.
Depuis que je suis tombée dans le bain de la neurodiversité, j’ai réalisé à quel point il y avait beaucoup de personnages neuro-atypiques dans les séries.
Des représentations plus ou moins réussies, mais parfois, ça fait écho.
Parfois, ça aide.
Aujourd’hui, j’ai eu envie de te partager mes préférées.
Certaines séries parlent d’autisme de façon très frontale.
D’autres incluent juste un personnage, un regard, une manière d’être au monde qui te fait penser "tiens, c’est come Gaston ou Ginette (ou moi)".
Alors j’ai tout classé pour toi, histoire que tu puisses piocher selon ton humeur.
Et je te parle ensuite en détail de Parenthood, une série de 2010-2015 que j’ai récemment découverte et où l’autisme est présentée de façon très intéressante.
N : Netflix, D : Disney, P : Amazon Prime vidéo.
🎯 Séries où l’autisme est le thème central
Celles où le personnage principal est autiste, et où tout tourne (plus ou moins bien) autour de ça.
Atypical – Sam, ado autiste en quête d’indépendance. Hyper accessible, très 2010s. La série qui ‘banalise’ l’autisme, Sam n’a rien de spécial, il n’a pas de don, sa famille est banale. C’est une des premières séries où l’autisme n’est plus un spectacle entre Rain man et Good Doctor.
Extraordinary Attorney Woo (N) – Une jeune avocate autiste brillante, drôle et très sensible… aux baleines. Une représentation assez caricaturale de l’autisme (stéréotypies, sélectivité, rigidité), mais un regard intéressant sur la différence dans la culture coréenne.
The Good Doctor (D, N) – Un classique à ce stade, et même si on peut lui reprocher le côté ‘petit génie’, la progression de Shaun, et surtout l’évolution de ses collègues dans leur façon de l’inclure, est inspirante.
A Découvrir - je n’ai pas encore vu mais recommandé
The A Word (D) – Un petit garçon autiste, une famille qui tangue. La bande annonce donne le ton :-)
As We See It (P) – Trois jeunes adultes autistes en colocation. C’est drôle, touchant, ultra réaliste (et les acteurs sont autistes).
👁🗨 Séries avec des personnages autistes ou très clairement neuroatypiques, même si ce n’est pas dit
Tu sais, ces persos qui n’ont pas besoin d’un diagnostic pour qu’on les repère.
Sheldon (The Big Bang Theory) (N, P) – Rigide, ultra-littéral… pas besoin d’en dire plus.
Young Sheldon (N) – Apporte aussi un regard plus large sur les parents, même si les deux séries utilisent les spécificités de Sheldon comme ressort comique.
Wednesday (N)– Pas sociale, très analytique, et des passions ultra ciblées.
Anne (Anne with an E) (N) – Vocabulaire soutenu ultra développé, pensée en arborescence, débordante d’imagination, à côté des codes sociaux.
Beth (Queen’s Gambit) (N) – Silence, routine, hyperfocalisation.
Dr House, Bones, Sherlock – Trois versions de l’intelligence froide, inadaptée mais fascinante. Tous probablement autistes.
(J’avais fait un article sur Bones et l’acceptation de la différence ici l’année dernière.)
Geek Girl (N) – Harriet, ado ultra atypique repérée comme mannequin. Inspirée d’une autrice et jouée par une actrice toutes deux autistes même si le sujet reste la mode.
Paris (Gilmore Girls) (D) – Un personnage secondaire, reine de la surcharge mentale. Ambitieuse, intense, souvent incomprise, et avec des habiletés sociales très limitées. Elle s’en sort grâce socialement à l’aide de Rory, un des personnages principaux.
Morgane (HPI – version française, Disney+ et TF1) -
Francesca (Bridgerton, N) – Introvertie, passionnée de musique, souvent silencieuse ou à l’écart. Dans la dernière saison, sa manière d’être — calme, sensible aux sons, mal à l’aise dans les interactions sociales — a beaucoup fait réagir. Rien n’est dit, mais tout laisse penser à un profil neuroatypique. Même chose pour son futur mari, John, très musicien, très en retrait lui aussi. Une représentation toute en douceur, loin des clichés.
🐝 C’est quoi Hapyk ?
Hapyk, c’est un espace que j’ai créé pour les parents d’enfants neuroatypiques (et les parents neurodivergents eux-mêmes). J’y partage des articles sur le quotidien, les émotions, la charge mentale, la scolarité… sans jargon, sans recettes miracles.
En t’abonnant à la version payante, tu accèdes aux replays de 6 webinaires animés avec des pros (et des parents) sur l’autisme, les émotions, le sensoriel, le shutdown, les troubles associés, etc. Et surtout, tu soutiens ce travail pour qu’il continue à exister.
👪 Séries qui parlent aussi des parents, de ce que c’est d’élever un enfant autiste ou différent
Celles qui te font dire "ah, OK, je ne suis pas seule".
Atypical (N)– On suit aussi beaucoup la mère (et le père) de Sam, ainsi que sa sœur. Le thème de comment concilier les besoins de deux enfants différents est traité.
Les Mères Pingouins (série polonaise, N)
Trois mères d’enfants handicapés dont 1 autiste se retrouvent dans une école spécialisée.
Celle du garçon autiste, et accessoirement boxeuse pro (fallait oser), découvre le diagnostic tout au début et devient amie avec la mère et instagrammeuse d’une petite fille trisomique et celle d’un enfant hémi-plégique.
On s’attendrait à une série ultra déprimante mais pas du tout, c’est touchant et souvent très drôle (la sortie dans la nature vaut le détour).
Etonnamment elle a été N°1 de Netflix dans toute l’Europe.
👪 Zoom sur Parenthood : une série qui parle des parents… et pas que
Le thème central de la série est, sans surprise, comment une fratrie de quatre adultes gère le quotidien avec des configurations différentes : famille classique, monoparentale, célibataire sans enfant puis avec enfant.
Dans cette série, sans faire de spoiler incroyable, en saison 1, la famille d’Adam et Kristina découvre que leur fils de 9 ans, Max, est autiste sans déficience (syndrome d’Asperger, à l’époque en 2010).
📉 Le début : panique, normes, ABA et autocollants
Au fil des six saisons, on suit l’évolution de la position des parents face à ce diagnostic.
D’abord, il y a le refus. La panique.
Ce qu’on appelle encore à l’époque ses ‘déficits’.
Ils s’orientent vers une prise en charge ABA centré sur la norme : regarder dans les yeux, répondre d’une certaine façon… faire comme les autres. Tout devient une négociation pour des auto-collants.
🧭 Le tournant : renoncer à la norme, défendre leur enfant
Et puis, au fur et à mesure que Max grandit, leur posture évolue :
ils renoncent à certaines normes, parce qu’elles n’ont plus de sens — voire sont maltraitantes pour leur fils ;
ils prennent position contre l’ordre établi, et se battent pour une scolarité inclusive (comme quoi, y’a pas qu’en France).
👨👩👦 Le regard parental au centre (enfin !)
Ce que j’apprécie dans cette série, c’est qu’elle raconte surtout l’histoire du point de vue des parents, et en particulier du père — ce qui reste assez rare.
Dans Atypical, on voit beaucoup la mère de Sam, ultra-présente, et le père est plus en retrait.
Ici, c’est l’inverse : Adam prend une place centrale, sans pour autant être idéalisé.
On replace les contraintes de l’autisme dans le quotidien d’une grande famille, avec ses priorités, ses manquements, ses ratés.
🎭 Des scènes banales, mais tellement réelles
Il y a des scènes tellement banales pour nous, comme les fêtes de famille ou une crise de Max à cause d’un imprévu… On s’y croirait.
Ou ce moment où la mère annonce à Max quelque chose de très grave. Il l’écoute, puis dit simplement : “OK, je peux retourner faire mes trucs maintenant.”
Ou le moment où Adam, le père dit à Max qu’il l’aime et en retour, le silence.
La série ne cherche pas à "expliquer" l’autisme — surtout dans les premières saisons.
Elle le présente plutôt comme une contrainte pour la famille. Le point de vue de Max n’apparaît qu’à partir de la cinquième saison.
❓Un regard critiquable, mais sincère
On pourrait évidemment critiquer certains aspects, notamment le fait que l’autisme est d’abord vu comme une situation à résoudre ou que les parents sont ‘victimes’ de la différence de leur enfant.
Mais je trouve qu’elle reflète bien, d’une part, le chemin que les parents font — souvent à tâtons — et d’autre part, l’évolution de la société : en 2010, même aux États-Unis, le syndrome d’Asperger était encore vu comme une tare. Max est d’ailleurs régulièrement traité de "Triso" à l’école.
Et même en étant très neuroaffirmatif, on peut aussi comprendre que c’est dur pour un parent de dire je t’aime et de ne rien avoir immédiatement en retour.
Max aime probablement ses parents, mais l’expression de cet amour n’est pas immédiat ou facile à capter.
Et ça c’est un des aspects les plus difficiles quand son enfant est différent de soi.
Dans Atypical cet aspect est beaucoup plus lissé, alors qu’ici il est plus mis en avant et même si on n’a pas le point de vue de Max, l’expérience du parent dans ces situations est entendue et validée. Et ça peut faire du bien.
🌱 Une série qui évolue comme ses personnages
Au fil des saisons, la vision change : Max devient un personnage moins abrasif, plus attachant ; les parents montent au créneau pour l’inclusion ; et surtout, on voit apparaître un personnage autiste adulte, qui devient un modèle à la fois pour Max… et pour ses parents.
👉 Parenthood, c’est une série généraliste, familiale, mais avec cette touche de diversité qui ne sonne pas plaquée.
Et quand j’ai découvert que le réalisateur avait lui-même un fils autiste (diagnostiqué avant l’écriture), tout s’est éclairé. Ça explique aussi pourquoi la représentation évolue si fortement au fil des années et les scènes sont si justes.
Si tu es comme moi, ces séries ne sont pas juste un divertissement. Elles deviennent des repères, des appuis, parfois même des compagnons de route. Parfois on pleure. Parfois on rit. Et parfois, on se dit juste : “Ah. Quelqu’un d’autre a vécu ça.”
Évidemment, cette liste de série est loin d’être exhaustive et mon avis très subjectif.
Mais j’espère qu’elle t’aura plus, si oui, pense à mettre un petit coeur ❤️.
Peut-être que toi aussi, tu as une série, un personnage, une scène qui t’a bouleversé.e ou soulagé.e.
Si tu as envie de partager, je serais ravie de te lire!
Merci pour toutes ces références ! Je partage les miennes ici : https://poppysilverspoons.blog/category/autisme/culture/regarder/
Ma préférée : « on the Spectrum » qui a inspiré « as we see it » … c’est intéressant également de voir comment les différentes cultures abordent le sujet. J’avoue avoir eu beaucoup de mal avec parenthood… je me suis énervée toute seule face aux réactions de ces parents pourtant aimants... cette éducatrice ABA me rendait dingue. Dans « the A word » j’ai mieux compris, même si je n’adhérais pas non plus à leur vision. … à bientôt
Je suis loin d’être spécialiste du sujet de l’autisme, mais plus ça va plus je pense que la société est inadaptée pour tout le monde et pas seulement les autistes ! Et faire rentrer les enfants dans des cases… le mien n’est pas (ou probablement pas) autiste, mais il ne marche pas et ne prononce aucun mot à 18 mois, et donc forcément ça renvoie à plein d’attentes de la société … donc je n’ose même pas imaginer ce que vivent les parents d’enfants autistes…