Pourquoi la compensation n’est pas la solution pour nos enfants autistes à l’école
ou comment trouver l'équilibre entre les aménagements et l'acceptation de la différence
Si tu as un enfant autiste, tu sais déjà que chaque rentrée scolaire est un mélange d’espoir et d’inquiétude.
Certains jours, tout va bien et on se dit que ça ira pour l’année. Mais d’autres jours, le stress et la fatigue s’installent.
Alors, comment aider ton enfant à naviguer dans ce marathon qu’est l’année scolaire, tout en évitant l’épuisement ?
En France, l’école reste un environnement très normé. Malheureusement, la culture privilégie encore l'intégration ("fais des efforts pour t’adapter") à l'inclusion ("viens comme tu es, on s’adapte").
Même si des dispositifs comme les DAR (dispositifs d’autorégulation) montrent des avancées, le focus reste souvent sur l'élève, qui doit se conformer.
Résultat : nos enfants compensent.
Compensation : une épée à double tranchant
La compensation peut être une compétence précieuse. Nos enfants apprennent à masquer leurs difficultés pour se conformer aux normes sociales et scolaires.
Mais attention, poussée trop loin, elle devient épuisante et dangereuse. Beaucoup d’adultes autistes témoignent que la compensation excessive peut mener à un burn-out autistique.
À l’école, la compensation se manifeste souvent de manière subtile :
Imiter les autres élèves pour masquer ses difficultés.
Éviter certaines situations (aller aux toilettes fréquemment, faire des crises quand on l'interroge).
Réprimer ses besoins sensoriels et ses auto-stimulations.
S’isoler socialement pour éviter les interactions stressantes.
Prenons l’exemple de Julie, 9 ans. Elle passe sa journée à sourire et à imiter ses camarades, sans demander de l’aide même si elle ne comprend pas toujours ce qui se passe. À la maison, elle s’effondre en larmes et refuse de parler.
Marcel lui, est réservé en classe, se débrouille très bien scolairement, mais dès qu’il passe la porte, il devient agité, agressif, colérique et refuse de faire ses devoirs.
Ce sont souvent des signes de d’un trop-plein de compensation. Sur le long terme, cela conduit à l'épuisement.
Les signes d’une compensation excessive :
Épuisement mental et physique.
Anxiété accrue.
Crises ou effondrements émotionnels à la maison.
Baisse de l’estime de soi et des performances scolaires.
Insomnies et anxiété anticipative (surtout les dimanches soirs).
Apparition de douleurs physiques (maux de tête, ventre, nausées) sans cause apparente.
Phobie scolaire
Le lien entre compensation et acceptation de l’autisme
Plus un enfant se sent accepté dans sa différence, moins il ressent le besoin de masquer.
Lorsque ton enfant perçoit que sa famille, ses enseignants et son environnement acceptent son autisme, il peut être lui-même, sans chercher constamment à se conformer. L’équilibre se trouve alors dans la réduction de la compensation et la mise en place d’aménagements.
Après un diagnostic, la tentation peut être de vouloir "gommer" toutes les différences pour faciliter l’adaptation de l’enfant.
Mais il est essentiel de comprendre que certains comportements, même s'ils semblent "hors norme", sont une manière pour l’enfant de fonctionner et de s’autoréguler. Et surtout qu’il n’est pas viable à long terme de chercher à les supprimer.
L'acceptation après le diagnostic : un moment charnière
Après un diagnostic d’autisme, il est fréquent de constater une augmentation des signes autistiques chez l'enfant. Cela peut surprendre, mais c'est souvent parce que l'enfant, se sentant enfin compris et accepté dans sa différence, se sent autorisé à être lui-même. Ce relâchement du masque est en fait un bon signe : il permet à l'enfant de réduire la compensation, de s’accepter pleinement et d'éviter l'épuisement.
Il est donc crucial que l’acceptation accompagne ce moment afin de créer un environnement où l’enfant n’a plus besoin de masquer son identité.
Comment trouver cet équilibre ?
À la maison :
Accueillir les signes de fatigue : Quand ton enfant dit “STOP, c’est trop”, cela signifie qu’il a atteint ses limites. Écouter ces signaux montre à ton enfant que tu reconnais ses besoins. Apprendre à reconnaitre ses limites est une compétence indispensable pour une personne autiste et en prenant en compte la demande, tu renforces cette capacité.
Adapter les demandes suivant son état : Diminue la quantité de tâches ou ajuste leur complexité. Proposer plus de soutien, collaborer sur certaines activités, ou simplement prendre le relais lorsqu’il en a besoin peut faire toute la différence.
Renforcer les aménagements sensoriels : Chaque enfant a des besoins sensoriels uniques. En lui fournissant des outils adaptés ou des situations adaptées tu lui permets de se réguler tout au long de la journée.
Accepter et favoriser également les auto-stimulations (ou stéréotypies), car elles permettent à l’enfant de se recentrer et de se réguler émotionnellement.
Maintenir des routines rassurantes : Elles apportent un cadre apaisant pour de nombreux enfants autistes. Assure-toi de maintenir une stabilité dans les horaires, tout en intégrant des moments pour des activités qui l’épanouissent, comme ses passions ou des activités physiques.
Avec l’établissement scolaire :
Collaborer avec les enseignants : Sensibiliser les enseignants à travers des échanges réguliers ou via des dispositifs comme la Fiche de présentation ou l’ESS (Équipe de Suivi de Scolarisation) est essentiel. Expliquer les besoins spécifiques de ton enfant et les signes d'épuisement permettra à l'équipe éducative de mieux l’accompagner.
Proposer des pauses régulières : Encourage l’équipe éducative à offrir des pauses tout au long de la journée (pouvoir se lever, prendre l’air, ou accéder à un endroit calme comme le CDI). Ces moments permettent à ton enfant de relâcher la pression accumulée et d’éviter la surcharge émotionnelle.
Je suis consciente qu'il est parfois difficile de les convaincre à mettre en place des aménagements tant le masquage des difficultés est efficace. Je réfléchis actuellement à des ressources pour t'aider dans cette démarche. En attendant, viens partager sur le groupe Facebook Hapyk si tu as besoin d'aide.
En conclusion
L’équilibre entre compensation et aménagement/acceptation va fluctuer en fonction de son âge, du contexte et des compétences qu’elle développe.
A toi de voir, en fonction de ton enfant, quand la compensation en vaut la peine et quand il faut aller dans le sens d’aménagements.
A bientôt
Alexia ♥️